Accord de réconcilation : la Namibie réclame plus d'argent à l'Allemagne // Contestation des fermetures de routes à la frontière franco-espagnole | PROGRAMME | DW | 16.11.2022
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Accord de réconcilation : la Namibie réclame plus d'argent à l'Allemagne // Contestation des fermetures de routes à la frontière franco-espagnole

Après l'annonce d'un accord financier et la reconnaissance du génocide contre les Hereros et les Namas il y a un an, Windhoek réclame désormais davantage d'argent à l'Allemagne. En seconde partie de cette émission : reportage à la frontière franco-espagnole, où des habitants combattent la fermeture de routes par le gouvernement français qui entend lutter notamment contre l'immigration illégale.

C'était un événement en mai 2021 : l'Allemagne reconnaissait sa responsabilité dans le génocide des Hereros et Namas et annonçant un accord de réconciliation avec la Namibie. Une première pour une ancienne puissance coloniale et un pays africain, où avait eu lieu le premier génocide du siècle dernier, entre 1904 et 1908. 

A l'époque l'Allemagne occupe ce qu'elle nomme alors le "Sud-ouest africain allemand", sur le territoire de l'actuelle Namibie. Depuis 20 ans déjà. Mais en 1904, les Hereros, puis les Namas, quelques mois plus tard, se soulèvent. Ils n'en peuvent plus de la répression coloniale et des Allemands qui s'accaparent toujours plus de terres. Des soulèvements qui évidemment ne plaisent pas aux colons, qui décident alors de réprimer dans le sang la contestation. 65.000 des 80.000 Hereros de l'époque sont tués. 10.000 Namas, 50% de la population, aussi. Cela restera dans l'histoire comme le premier génocide du 20ème siècle.

Portrait d'Heiko Mass, ministre des Affaires étrangères jusqu'à fin 2021

"Nous qualifierons maintenant officiellement ces événements pour ce qu'ils sont du point de vue d'aujourd'hui : un génocide", avait déclaré le ministre allemand des Affaires étrangères Heiko Maas en 2021

En 2021, l'Allemagne reconnaît donc sa responsabilité dans ces massacres, après six ans de négociations bilatérales. Berlin promet en plus une somme d'argent importante pour la Namibie en réparations, s'engageant à verser 1,1 milliard d'euros sur 30 ans dans des projets d'aide au développement notamment. 

L'aspect juridique du texte contesté... 

C'est cela en particulier que conteste aujourd'hui un an et demi après le gouvernement namibien. "Nous devons discuter, la somme n'est pas assez importante", a dit il y a quinze jours encore le vice-président namibien. "La pression en Namibie et les critiques sont devenues trop fortes", décrypte sur la DW l'historien allemand qui connaît bien le dossier, Jürgen Zimmerer. "Il y avait déjà des critiques depuis des années, elles ont accompagné le processus de négociation. On reprochait au gouvernement de trop peu impliquer les représentants des Herero et Nama. L'année dernière, il y a eu des débats houleux au Parlement namibien et désormais la résistance est tout simplement devenue trop importante".

Des débats et des contestations qui portent sur la forme de l'accord déjà. Le texte est tourné de telle façon que la responsabilité juridique de l'Allemagne dans le génocide ne peut être engagée. Aucun procès avec des demandes de réparations ne pourrait être lancé devant des tribunaux internationaux. Cela a déjà provoqué des remous et même des manifestations des descendants des Hereros et Namas l'an dernier.

Deux personnes a une manifestation contre l'accord entre l'Allemagne et la Namibie à Berlin

Des manifestations contre l'accord annoncé ont déjà eu lieu également en Allemagne, comme ici à Berlin

... Tout comme l'accord financier 

Les descendants de Hereros et Namas contestent aussi la somme de 1,1 milliard d'euros sur laquelle les deux pays se sont mis d'accord, trop basse selon eux. Ils craignent aussi que l'argent n'arrivent pas sur le terrain où ils vivent comme prévu. "La déclaration conjointe est suicidaire pour les Hereros et les Namas", estime Mutjinde Katijua, chef traditionnel namibien du peuple Herero, qui répète qu'il n'acceptera pas cet accord. "Cela nous exclut même de la gestion des ressources, de la gestion du budget de réparation ou des paiements. Il faut un projet de la Namibie pour tous les Namibiens, même en région".

Comme d'autres, il estime aussi que le milliard d'euros annoncé ne suffit pas. Il y a quelques jours le vice-président de la banque centrale du pays évoquait la somme de 70 milliards nécessaires. Une somme conséquente pour l'Allemagne. A titre de comparaison, le pays a débloqué 100 milliards pour son armée récemment, 200 milliards pour faire face aux conséquences économiques de la guerre en Ukraine. Ses marges de manœuvre pour la seule Namibie sont donc réduites. "C'est difficile dans la mesure où la situation financière globale est nettement plus difficile depuis la guerre en Ukraine, mais d'un autre côté, je pense que le gouvernement fédéral doit faire ces concessions et serait bien avisé de ne pas laisser ce processus de négociation se résumer à un simple marchandage d'argent", commente l'historien Jürgen Zimmerer.

Une plainte à l'étude

Groupe de personnes photographiées de dos lors d'une manifestation contre l'accord entre l'Allemagne à Berlin

En Namibie des premières manifestations avaient eu lieu dès 2021

Des discussions sont en cours en ce moment, assure le ministère des Affaires étrangères allemand, sans en dire beaucoup plus. On parle à Berlin de renégociations, pas de nouvelles. Comme pour faire comprendre qu'il ne s'agit pas de reprendre tout à zéro, qu'on débat davantage de détails. Et donc pas de milliards en plus. Des négociations que voit d'un œil très critique le chef traditionnel namibien du peuple Herero. "Le gouvernement namibien est coincé", estime Mutjinde Katijua. "On dirait que les responsables disent à l'Allemagne : « Allez, aidez-nous en donnant un peu plus qu'on puisse vendre cela et avoir assez de soutien pour le faire passer en Namibie ». Si l'Allemagne ne le fait pas, l'accord risque de tomber à l'eau." 

Selon nos informations, il semblerait que, des deux côtés, on veuille aller vite sur ce dossier. Une délégation namibienne pourraient prochainement se déplacer à Berlin pour négocier, même si le gouvernement allemand ne confirme pas l'information. En Namibie, les représentants Hereros et Namas envisagent eux des actions en justice contre l'accord actuel s'il était maintenu. 

En septembre déjà, saisi par Mutjinde Katijua, un avocat namibien a écrit  au procureur général. Il estime que le gouvernement namibien a violé la Convention des Nations unies pour la protection des peuples indigènes en excluant les Herero et les Nama des négociations. Le procureur a rejeté l'accusation. Mais une plainte devant la Cour suprême de Namibie est désormais à l'étude. Elle pourrait être déposée une fois l'accord final entre l'Allemagne et la Namibie validé. En attendant les négociations entre les deux Etats se poursuivent.

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Retour des frontières dans l'espace Schengen à la frontière franco-espagnole

Des blocs de pierre déposés sur la chaussée au col de Banyuls

Le col de Banyuls est fermé depuis janvier 2021 avec des blocs de pierre déposés sur la chaussée

En seconde partie de ce magazine, Vu d'Allemagne est à la frontière entre la France et l'Espagne, où les frontières physiques sont de retour, malgré l'espace Schengen et l'Union européenne. Depuis près de deux ans, Paris a décidé de fermer une dizaine de points de passage entre les deux pays, dont le col de Banyuls dans les Pyrénées Orientales. Officiellement il s'agit de lutter contre le terrorisme et l’immigration clandestine. Mais cette décision unilatérale bouleverse le quotidien de nombreux habitants et réveille des blessures historiques comme le raconte sur place notre correspondant Henry de Laguérie.

Vu d’Allemagne est un magazine radio hebdomadaire, proposé par Hugo Flotat-Talon et Anne Le Touzé, avec le travail de Daniel Pelz cette semaine pour le sujet concernant la Namibie et l'Allemagne, diffusé le mercredi et le dimanche à 17h30TU, et disponible aussi en podcast.Vous retrouvez tous les numéros dans la médiathèque, à écouter en ligne ou à télécharger en format MP3. Le podcast est également disponible sur certaines plateformes de podcasts.

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