Une organisation de femmes du Nigeria distinguée en Allemagne // Au Mexique, un centre pour "reconstruire" les migrants traumatisés | PROGRAMME | DW | 17.11.2021
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PROGRAMME

Une organisation de femmes du Nigeria distinguée en Allemagne // Au Mexique, un centre pour "reconstruire" les migrants traumatisés

L'organisation de femmes Women’s Interfaith Council est lauréate du prix de la Paix d’Aix-la-Chapelle 2021. Elle s'engage au Nigeria pour la co-existence pacifique entre musulmans et chrétiens. // Dans la deuxième partie de ce magazine, reportage au Mexique dans un centre qui vient en aide aux migrants qui ont subi des tortures et des mauvais traitements.

Elizabeth Majinka Abuk et ses co-lauréates ont l’impression d’être des “superstars internationales”. Et pour cause, leur organisation a reçu le 14 novembre le prix de la paix d’Aix-la-Chapelle. 

Le Women's Interfaith Council ou WIC a été récompensé pour le travail interconfessionnel qu’il mène dans l'État de Kaduna, au Nigeria : des femmes chrétiennes et musulmanes s'y unissent pour tenter de mener une coexistence pacifique. 

Donner une voix aux femmes

Le WIC accompagne au quotidien les femmes victimes de violences

Le WIC accompagne au quotidien les femmes victimes de violences

Sœur Veronica Onyeanisi dirige l’organisation depuis 2019. “Les femmes sont toujours reléguées à l’arrière-plan comme si elles n’avaient rien à offrir à la société", confie la religieuse selon laquelle "une société qui néglige les femmes ne peut jamais se développer, ni progresser." Le WIC vise donc à "donner aux femmes une voix pour qu’elles puissent contribuer positivement à la société.” 

Kaduna, situé dans le nord-ouest du Nigeria, est le troisième État le plus peuplé du pays, avec environ 8,3 millions d’habitants. Selon les estimations, 60% de la population est musulmane et 40% chrétienne.  

Depuis des années, cette région est frappée par des attaques répétées, des enlèvements et autres actes de violences commis par des bandes armées. Il y a quelques mois, les enlèvements de centaines d'élèves et d'étudiants se sont d’ailleurs succédé. Les bandits tentent généralement d'extorquer des rançons.  

Autrefois, la vie à Kaduna était pourtant "une belle vie", se souvient sœur Veronica Onyeanisi. "Les gens vivaient ensemble en paix, faisaient la fête ensemble."

Les enlèvements d'écoliers ou d'étudiants se sont multipliés ces dernières années comme ici, à l'école baptiste de Chikun, en juillet 2021

Les enlèvements d'écoliers ou d'étudiants se sont multipliés ces dernières années comme ici, à l'école baptiste de Chikun, en juillet 2021

Cela a changé lorsque "des fanatiques religieux et des politiciens [ont décidé] d'utiliser la religion pour diviser les gens à cause du manque de connaissance mutuelle entre les religions. Et cela a entraîné une division entre les chrétiens et les musulmans qui a conduit les musulmans à vivre dans les régions du nord, tandis que les chrétiens se sont installés dans les régions du sud." 

Le Women’s Interfaith Council a été créé en 2010 pour lutter contre l'escalade de la violence dans l’État de Kaduna. Les femmes du WIC rendent visite aux victimes d'attaques.

Elles organisent aussi des formations pour d'autres femmes et pour les jeunes. Et surtout, elles apportent le soutien d’une communauté et font en sorte que des femmes des deux religions se retrouvent et célèbrent ensemble les principales fêtes religieuses. 

Des milliers de femmes engagées

L’organisation vit de l’engagement de plusieurs milliers de femmes qui agissent dans 23 associations locales. Nombre d’entre elles ont déjà été confrontées à la violence, que ce soit personnellement ou au sein de leur famille. C’est le cas d’Elizabeth Majinya Abuk, qui coordonne les organisations chrétiennes du WIC. 

Avant la fondation de l’organisation, elle travaillait déjà avec des associations de femmes chrétiennes à Kaduna. Au début, elle a hésité à s’engager au sein du WIC. Elle venait tout juste de subir un coup du sort avec la mort brutale de sa sœur et de sa famille dans un cambriolage. 

Elizabeth Majinka Abuk (à gauche) et sœur Veronica Onyeanisi (milieu) auprès de victimes d'une attaque dans un village de Kaduna

Elizabeth Majinka Abuk (à gauche) et sœur Veronica Onyeanisi (milieu) auprès de victimes d'une attaque dans un village de Kaduna

Aujourd’hui, la plupart des membres de sa famille vivent comme des déplacés à l’intérieur de leur propre pays. Mais la "passion pour la paix" d’Elisabeth Abuk l’aide à surmonter les difficultés. "Je veux voir les gens vivre en paix. Je ne veux pas que ce qui est arrivé à ma famille arrive à une autre personne. Et c’est à cause de cette passion que j’emploie toutes mes forces et tout mon esprit pour que nous vivions ensemble pacifiquement." 

Daharatu Ahmed Aliyu, qui représente les associations musulmanes, n’a pour sa part jamais douté du bien-fondé de son action. La journaliste se souvient qu’un collègue avait cru à une blague lors de la création du WIC. Il ne pouvait pas croire que des chrétiennes et des musulmanes puissent s’associer. 

"Tout est une question de temps" estime-t-elle. "Ce n’est pas facile. Il y a tant de défis qui nous entourent. Mais même la crise, lorsqu’il sera temps qu’elle se termine, elle se terminera.” 

Impliquer les hommes

En attendant, les membres du WIC sont conscientes que pour atteindre leurs objectifs, elles doivent impliquer les hommes qui prennent les décisions au sein des communautés. C’est pourquoi elles consultent les chefs traditionnels et religieux avant de démarrer des projets. 

Certains réagissent avec méfiance, mais les femmes du WIC savent comment leur parler. Selon Sœur Veronica Onyeanisi, “Dieu a donné aux femmes un don qu’aucune autre personne n’a. En tant que femmes, nous avons cette capacité de tendre la main à n'importe qui, quelle que soit la dureté de la personne".

Le prix de la paix d’Aix-la-Chapelle récompense depuis plus de 30 ans des “femmes, hommes ou groupes qui se battent contre les injustices et pour la paix”. En 2020, il avait été attribué au père Antoine Exelmans, un prêtre qui consacre sa vie à aider des migrants et réfugiés au Maroc.

Du point de vue du conseil d'administration, sa remise au WIC est "un prix mérité" souligne sa porte-parole Lea Hauser, qui a été convaincue à la fois par le "fait que le travail soit effectué au-delà des frontières religieuses, c'est-à-dire de manière interreligieuse, mais aussi à cause de l’incroyable solidarité des femmes concernées envers d'autres femmes exposées à la violence massive et à un système patriarcal massif, qui, malgré leurs propres traumatismes et expériences de la violence, s'y opposent, se soutiennent mutuellement et vivent simplement cette solidarité au-delà de toutes les frontières. Nous trouvons tout cela très digne d'un prix." 

Le Prix de la paix d’Aix-la-Chapelle 2021 a été également décerné à deux initiatives locales à Hanau en Allemagne, pour leur travail contre le racisme après l’attentat contre deux bars à chicha qui avait fait neuf morts en février 2020.  

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Un centre pour "reconstruire" les migrants traumatisés au Mexique

Entre l’Amérique centrale et les États-Unis, la route est longue et les chemins migratoires sont pleins de dangers. Là-bas, les migrants sont des proies faciles pour les groupes criminels et sont victimes de nombreuses violences extrêmes. 

À Mexico, un centre de soin accueille ces personnes qui ont vécu l’horreur. Géré par MSF, il rassemble une équipe de médecins, de psychologues et de travailleurs sociaux qui œuvrent auprès des migrants pour les aider à reconstruire une nouvelle vie. 

→ Un reportage à écouter en deuxième partie de Vu d'Allemagne, en cliquant sur l'image principale de cet article.

 

Vu d’Allemagne est un magazine radio hebdomadaire, proposé par Hugo Flotat-Talon et Anne Le Touzé, diffusé le mercredi et le dimanche à 17h30TU, et disponible aussi en podcast. Ont contribué à ce numéro : Uta Steinwehr (sujet sur le prix de la paix d'Aix-la-Chapelle) et Gwendolina Duval (reportage au Mexique). Vous retrouvez tous les numéros dans la médiathèque, à écouter en ligne ou à télécharger en format MP3. Le podcast est également disponible sur certaines plateformes de podcasts.