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Le massacre de Moura fait écho aux crimes en Ukraine

6 avril 2022

Selon Human Rights Watch, l’armée malienne et ses alliés russes auraient exécuté plus de 300 civils maliens à Moura dans une opération antiterroriste.

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Des soldats maliens s'entraînent près de Tombouctou (Archives)
Des soldats maliens s'entraînent près de Tombouctou (Archives)Image : Ben Curtis/picture alliance/AP Photo

Selon Human Rights Watch, il s'agit du "pire épisode d'atrocités constaté depuis le début de la guerre au Mali il y a dix ans." 

Ces exactions ont été commises avec la participation de soldats de couleur blanche présentés par des témoins comme étant des Russes. 

La junte veut à tout prix prouver qu'elle est à la hauteur des enjeux sécuritaires du pays, selon Leslie Varenne.
La junte veut prouver qu'elle est à la hauteur des enjeux sécuritaires du pays.Image : Mehmet Kaman/AA/picture alliance

"Il étaient au courant (des témoins maliens) que le Mali avait annoncé depuis quelques mois l'arrivée des formateurs Russes pour aider, pour entraîner et former l'armée malienne. Mais nos témoins ont parlé de blancs et parfois, ils ont décrit les blancs comme des Russes", affirme Corinne Dufka, directrice adjointe de la division Afrique de Human Rights Watch.

La violence de ces exactions est-elle due en grande partie à la présence des mercenaires russes de Wagner et peut-on faire un parallèle avec les massacres de civils en Ukraine ? 

On ne peut pas l’affirmer car les forces armées maliennes ont déjà été plusieurs fois accusées de crimes contre des civils, même bien avant l’arrivée des Russes, rappelle Leslie Varenne, directrice de l'Institut de veille et d'étude des relations internationales (IVERIS).

"C’est l’armée malienne qui donne les ordres et qui choisit ses cibles" (Leslie Varenne)

Elle explique que "les forces armées maliennes n'ont pas attendu les Russes pour commettre des exactions. Il semble quand même que c'est l'armée malienne qui donne les ordres et qui choisit ses cibles. Il y en a eu à Sofara. C'était le mois dernier. On a trouvé 35 corps. Il y a eu l'affaire des Mauritaniens. Le conflit ukrainien masque un peu la réalité de ce qui se passe en ce moment au Sahel. En un mois, entre ce qui s'est passé à Moura, ce qui s'est passé à Ménaka, ce qui s'est passé à la frontière mauritanienne, ce qui s'est passé dans le centre du pays, on doit être à peu près à 1.000 morts. Et là, je ne compte pas les morts du Burkina et du Niger."

Un avis que partage aussi Emmanuel Dupuy, président de l’Institut prospective et sécurité en Europe. 

Montrer des résultats

Dans un communiqué publié mardi soir (05.04), les autorités maliennes ont rejeté les conclusions de Human Rights Watch qui, selon elles, visent à ternir l’image de leur armée. Mais pour Leslie Varenne, Bamako veut à tous prix montrer des résultats dans la lutte contre le terrorisme.

"Les autorités maliennes ont en ce moment besoin de résultats puisqu'elles sont toujours sous sanctions. Elles n'ont pas mis en place le chronogramme. Elles veulent absolument montrer des résultats dans la lutte contre le terrorisme. C'est une politique du chiffre qui n'a jamais été efficace. Mais c'est une politique du chiffre qui se fait sans discernement. Il y a peut-être aussi une volonté de créer un climat de terreur parmi les populations civiles, pour qu'elles se détachent des groupes djihadistes", soutient Leslie Varenne.

"Les deux contextes sont différents" (Emmanuel Dupuy)

Même si ces atrocités sont dénoncées par Human Rights Watch, Corinne Dufka ne les compare donc pas à celles commises par l’armée russe à Boutcha, où des centaines de civils ukrainiens ont été tués.