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RCA : un rebelle de la Séléka devant la CPI

Jean-Fernand Koena
26 septembre 2022

Mahamat Said Abdel Kani est poursuivi pour sept chefs d'accusation de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité commis entre avril et août 2013 à Bangui.

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Un combattant rebelle de la Seleka à Bambari en 2014
Un combattant rebelle de la Seleka à Bambari en 2014Image : Jerome Delay/AP Photo/picture alliance

C’est pour des crimes qu’il aurait commis en sa qualité du directeur de l’Office central de répression du banditisme (OCRB) que Mahamat Said Abdel Kani est jugé à partir de ce lundi (26.09) face aux juges de la Cour pénale internationale.

La CPI le poursuit pour sept chefs d'accusation de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité commis entre avril et août 2013 à Bangui contre des détenus accusés de soutenir l'ancien président François Bozizé. Fin 2021, la CPI a partiellement confirmé  les charges portées contre Mahamat Said Abdel Kani, notamment les chefs de torture, de persécution, de traitement cruel et d'atteinte à la dignité des personnes.

François Bozizé a dirigé la RCA du 15 mars 2003 au 24 mars 2013
François Bozizé a dirigé la RCA du 15 mars 2003 au 24 mars 2013 Image : AP

Le procès de  Mahamat Saïd Abdel Kani  était attendu depuis longtemps déjà par les victimes et les organisations des droits de l’Homme. 

Selon Ousmane Diarra, chercheur pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale auprès d’Amnesty International, la République Centrafricaine "connaît des cycles de violence depuis plusieurs années. De nombreux abus et violations des droits de l’Homme ont également été commis."

Il ajoute  que  "l’ouverture de ce procès est un signal positif dans le cadre de la lutte contre l’impunité qui est un sujet très présent dans la société centrafricaine. Les victimes, elles, sont là et elles sont en train d’attendre et d'obtenir justice depuis très longtemps." C'est pourquoi, rappelle Ousmane Diarra, "ce procès est donc positif pour les associations des victimes qui luttent pour obtenir l’organisation de procès pour que ces présumés auteurs puissent faire face à la justice. A côté de la CPI, il faut noter le travail qui est fait par la Cour Pénale Spéciale et également les tribunaux centrafricains qui doivent continuer de bénéficier d’un soutien politique interne fort pour qu’ils puissent remplir leur mission en toute indépendance et en toute impartialité."

Un haut cadre de la Seleka

En 2013, Mahamat Said Abdel Kani, membre présumé de haut rang de la coalition Séléka, travaillait sous la responsabilité directe de Nouredine Adam, à l’époque ministre de la Sécurité publique, lui aussi recherché par la CPI pour avoir enlevé, torturé et tué plusieurs personnes dans les bâtiments du Cedad – le Comité extraordinaire pour la défense des acquis démocratiques – transformés de fait en centre de détention illégal. Mais contre Mahamat Said Abdel Kani,  la CPI a décidé de retenir uniquement les crimes commis à l'Office Centrafricain de Répression du Banditisme (OCRB).

Clarification

Me Bruno Hyacynthe Gbiagbia, coordinateur adjoint de la coalition qui soutient les actions de la CPI, souhaite que la responsabilité de commandement soit bien clarifiée et que le procès ne s’éternise pas, comme ce fut le cas pour le dirigeant congolais Jean-Pierre Bemba.  

Jean-Pierre Bemba a passé dix ans de prison á la Haye
Jean-Pierre Bemba a passé dix ans de prison á la HayeImage : AP

"Ce monsieur est accusé d'avoir commis des crimes les plus graves qui heurtent la conscience. Au-delà de ce principe qui s’inscrit dans la lutte contre l’impunité des chefs hiérarchiques, nous souhaitons que le procès se déroule dans de très bonnes conditions. Que le droit des victimes soit reconnu, que le droit de l’accusé soit reconnu. Nous souhaitons aussi que l’affaire ne soit pas traînée en longueur comme ce fut le cas de Jean-Pierre Bemba. Qua la Cour établisse une jurisprudence claire concernant le rôle des supérieurs hiérarchiques parce que pour certains crimes ce n’est pas M Saïd qui les a commis mais plutôt des gens qui sont sous lui qui ont commis ces fautes."

Les explications de Jean-Fernand Koena

Plusieurs chefs de guerre courent encore et toujours en République centrafricaine et la CPI n’a pas encore bouclé son information judiciaire dans le pays.  

Pour rappel, le coup d'État de 2013 en Centrafrique avait renversé le président François Bozizé et plongé le pays dans la guerre civile. Les combats ont opposé une coalition de groupes armés qui ont renversé Bozizé, la Séléka majoritairement musulmane, et des milices le soutenant, majoritairement chrétiennes anti-Balaka. Selon la CPI, les violences auraient fait des milliers de morts et des centaines de milliers de déplacés.