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Le manque de moutons avant la tabaski en Casamance

26 juin 2023

A deux jours du début officiel de la Tabaski (28 et 29 juin), la grande fête musulmane, la plupart des familles ziguinchoroises, au sud du Sénégal, peinent à trouver un mouton pour perpétuer l'acte d'Abraham.

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Un homme tient des moutons par des cordes (illustration)
Cette année n'est pas comme les autres à ZiguinchorImage : Mohammed Talatene/dpa/picture alliance

Le foirail de la ville de Ziguinchor, où se ravitaillent une partie des habitants de la région, et même des pays limitrophes comme la Guinée-Bissau ou la Gambie, demeure presque vide à quelques jours de l'aïd-el-kebir ou tabaski.

Cette pénurie de moutons pourrait bien être la conséquence des troubles politiques que le Sénégal traverse depuis la condamnation de l'opposant Ousmane Sonko. En effet, les éleveurs hésitent à faire venir leurs moutons par peur des pillages.

Difficultés à trouver un mouton

Trouver un mouton pour l'aïd-el-Kabir, communément appelée tabaski au Sénégal, est le souci de beaucoup de familles en Casamance, notamment dans les grandes agglomérations comme Ziguinchor.

Mais cette année, les éleveurs maliens et mauritaniens, qui ont l'habitude d'approvisionner le marché sénégalais à la veille de cette grande fête musulmane, sont absents.

Selon Aliou Sow, un commerçant rencontré au foirail de Ziguinchor, le lieu où sont regroupés les moutons, les éleveurs redoutent de convoyer leurs troupeaux vers le Sénégal à cause des troubles que traverse le pays depuis le procès d'Ousmane Sonko :

''En fait, au marché de moutons, il n'y a pas une grande affluence. constate-t-il. Ce n'est pas comme les années précédentes. Je ne sais pas si ça va changer. Je reviens de Bakel (à la frontière entre le Sénégal et la Mauritanie, ndlr), mais tous les éleveurs que j'ai rencontrés là-bas disent qu'ils ont peur de venir, d'amener leurs moutons. Parce qu'avec la situation et les menaces qu'ils entendent, ils craignent de venir. Si ça continue comme ça, il risque d'y avoir une pénurie de moutons à Ziguinchor. Ce que je conseille aux populations de Ziguinchor, c'est de s'adonner à l'élevage. Il faut que chacun de nous puisse élever ne serait-ce qu'un bélier parce que la tabaski vient une fois par an''.

Des moutons sacrifiés à Niamey pour la tabaski en 2016 (illustration)
Les Casamançais craignent de manquer de moutons pour procéder au sacrifice rituel cette annéeImage : BOUREIMA HAMA/AFP/Getty Images

Des prix qui grimpent en flèche

La pénurie de moutons vient donc aggraver la traditionnelle hausse des prix à l'occasion de la tabaski. Abdoulaye Sagna est un père de famille, il vient depuis plusieurs jours dans ce foirail dans le but de s'acheter un mouton mais les tarifs sont trop élevés.

''Aujourd'hui, c'est la troisième fois que je viens ici, le mouton qui coûtait 100.000 francs CFA l'année dernière, actuellement on me le propose à 200 000 francs, déplore-t-il. Alors, ça devient très compliqué. Peut-être qu'il faut attendre pour voir. Mais d'après les informations que j'ai reçues, les gens ont peur d'amener les moutons compte tenu de la situation du pays. Ils disent que la situation n'est pas stable. Jusqu'à présent, Sonko est séquestré. Et tant que Sonko n'est pas libre, ça peut dégénérer à tout moment. Donc les éleveurs craignent d'amener leurs moutons. Parce que quelqu'un qui amène 100 à 200 têtes, si la situation dégénère, ce seront des pertes énormes''.

Ousmane Sané arpente, lui aussi, les lieux depuis des heures à la recherche d'un bélier mais il confirme que les prix sont inabordables : ''Il y a moins de moutons par rapport à l'année dernière à la même période, témoigne-t-il. Apparemment, les éleveurs ont peur par rapport à l'insécurité. Le mouton est cher par rapport à la bourse de certaines familles. Certaines familles risquent de se retrouver sans mouton. Ça c'est une probabilité''.

C'est désormais une tradition au Sénégal : dans toutes les familles musulmanes, on immole un mouton le jour de l'aïd-el-Kabir. Et celui-ci doit être de grande taille, pour faire la fierté des enfants qui l'exhibent dans le voisinage plusieurs jours avant la fête.